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[Comptez pas sur moi] Björk – Biophilia

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Nous sommes en 2011 et Björk vient de franchir un cap fatidique. Pas celui du fameux "album de la maturité". Celui, plus triste, de "l'album que personne ne va vraiment écouter". Posons-nous sérieusement la question : qui écoute encore Björk en 2011 ? Les gens comme moi, ceux qui l'ont écoutée dans les années 90, et encore, pas tous ; "Medúlla" puis "Volta" sont passés par là, et en ont découragé plus d'un à acheter les yeux fermés le nouveau Björk.

Non pas que ceux-ci fussent mauvais, loin de là, "Medúlla" étant d'ailleurs mon Björk préféré, inventif, sombre et ludique. Plus discutable, "Volta" contenait ses moments de gloire comme l'immense Declare Independance, apocalyptique, sans aucun doute son morceau le plus violent à ce jour. Il a cependant scellé l'avenir de Björk en exprimant clairement à son public : "N'espérez pas me revoir faire un Homogenic", sans que sa nouvelle direction parvienne à convaincre.

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"Mon prrrochain alböume serrrá dýrrrectement implanté dans vos ësprrrits"

Attention, attention, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : bien sûr que le fait que Björk ne souhaite pas rabâcher ses précédents albums en prenant une direction différente à chaque fois est une très bonne chose. Mais pour "Biophilia", c'est un rond-point qu'elle a pris, la mère Björk, et manifestement elle ne sait pas se placer pour en sortir. L'ex-fan peut jouer au jeu des 7 erreurs avec chacun de ces "nouveaux" titres : oh un bout de "Vespertine" par ci, hop une tranche de "Medúlla" par là, avant de se rendre compte que le jeu des 7 erreurs, c'est l'album lui-même (qui comporte 10 titres, ouch). Et franchement, personne n'aime jouer à ce jeu.

Björkphilia ? C'est le fil conducteur de cet album. Tu aimes écouter Björk ? Tu aimes écouter Björk s'écouter faire du Björk ? Tu aimes quand elle chante sans fard, de sa voix la plus sèche, distribuant ses "altsemankay" et autres interjections syllabiques irritantes à gogo ? Ça tombe bien : de la Björkphilia, il t'en faudra pour supporter cet amalgame souvent douteux de tout ce qui est Björk, de tout ce qui a fait Björk ces dernières années ; et ce n'est pas le délire jungle 90's (probablement signé Mark Bell) greffé à la fin d'un pénible Crystalline comme un pacemaker sur des restes humains encore chauds qui suffira à te satisfaire.

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(Björk se caresse pas mal le coquillage sur "Biophilia")
La cause, peut-être faut-il la chercher du coté du concept. "Biophilia" est un "concept-album" ; plus précisément, un "concept-dont-on-se-fout-album". Toute cette histoire fumeuse d'iPad n'est d'ailleurs pas sans rappeler le terrible dernier album de Gorillaz, "The Fall", tellement gadget qu'ils avaient hésité un peu avant de le vendre. Sans déconner : qu'est ce qu'un iPad peut décemment permettre de plus qu'un ordinateur classique ? En exhibant sa fascination pour cet objet peu fascinant au-delà du raisonnable, Björk se comporte comme un enfant devant une console V-Tech, pire, comme une mamie découvrant avec émotion la webcam par les coucous dans le coin supérieur droit de son écran de ses petits-enfants qui ne viennent plus la voir. Björk vieillit, et ça fait mal.

(Cosmogony)
Mais cela n'explique pas tout, et certainement pas l'existence de Cosmogony, abominable ballade pour documentaire animalier, la chanson qui va clouer le bec à tous ceux qui voudraient défendre "Biophilia" comme étant un album sacrifié par Björk sur l'autel de l'expérimentation. J'en ai entendu des bouses cette année, mais je ne m'attendais pas à ce que ce soit Björk, ma Björk - feue ma Björk devrais-je peut-être me résigner à dire, qui m'en inflige la synthèse.


(Hollow)

Hollow, dans un genre différent, rappelle l'une des ambitions premières de Björk : utiliser la pop comme vecteur pour faire passer des idées de composition inspirées de Stockhausen, de Schönberg, ou d'autres compositeurs germaniques en "S". Ici, Björk a visiblement poussé cette ambition à son paroxysme en contraignant un chaton mourant à marcher pendant près de six minutes sur son orgue Bontempi, la chanteuse lui ayant au préalable brisé les pattes à l'aide d'un rouleau à pâtisserie. Je vous laisse juges ; personnellement tout cela me paraît extrêmement dérivatif, surtout après le "One Pig" de Matthew Herbert.

Blague à part, tout n'est pas à jeter dans cet album, et ses meilleurs moments sont justement ceux, rares, qui semblent aller de l'avant : Sacrifice et ses rythmiques aussi soudaines que saisissantes, ou même le réjouissant Virus qui nous rappelle que Björk est encore capable de composer des chansons simples et belles. L'audace n'est pas nécessairement synonyme de torture auditive. On peut jouer avec l'auditeur sans constamment lui dire "Hé, on s'amuse bien, pas vrai ?". L'audace, c'est d'en avoir sans la montrer.

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2/5

Joseph Karloff


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